Pourquoi Montparnasse attirait autant les peintres au début du XXème siècle ?

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Au début du XXe siècle, Paris s’est forgé progressivement un statut de centre artistique et culturel mondial. À cette époque, nombreux sont les artistes étrangers en exil qui s’y retrouvent afin de se regrouper et d’exprimer leur passion. Attablés autour des cafés bons marchés de la Coupole, de la Rotonde et du Dôme, les « Montparnos » donnent naissance à ce qu’on appelle aujourd’hui l’École de Paris.

L’esprit de Montparnasse est né à Montmartre.

Au début du 20e siècle, Paris était la capitale mondiale de l’art, et il n’est pas étonnant que la ville ait attirée autant d’artistes de toute nationalité, qui ont fait de Montparnasse le centre de la vie culturelle. Avant la Première Guerre mondiale, c’est essentiellement à Montmartre que les artistes venus du monde s’installaient, notamment au Bateau-lavoir.

Mais le quartier commencera à devenir très connu, et les prix des loyers augmentent. Parmi les raisons de ce déplacement vers Montparnasse, la stabilité économique est l’un des points essentiels. À Montparnasse, les artistes vont retrouver des lieux à prix bas, afin d’y habiter et de tenir leur atelier. Ils viennent chercher à Montparnasse un avantage fiscal. Les loyers étaient moins cher qu’à Montmartre, et le vin aussi. Les grands entrepôts du quartier offraient aux sculpteurs et aux peintres, de l’espace pour pratiquer leur art. C’est ainsi que de véritables cités d’artistes voient le jour. Si les artistes venaient massivement à Montparnasse, c’est aussi grâce à la présence de grands-maîtres peintres déjà installés comme Picasso, Braque ou Matisse.

En plus de pouvoir travailler à des prix modestes, les artistes pouvaient aussi partager leurs modèles et profiter des conseils des artistes de renom déjà installés à Montparnasse. En parallèle, Paris offre un environnement propice à l’épanouissement, grâce à de nombreuses galeries d’art, de critiques et de collectionneurs, le tout favorise une dynamique autour de la création. Les soirs, les artistes pouvaient se retrouver dans les nombreux cafés du quartier. Une atmosphère solidaire et amicale se crée autour de Montparnasse.

Le Tout-Paris artistique s’attable d’abord aux terrasses du Dôme et de la Rotonde avant d’investir les tables du Sélect et de la Coupole. Paris a aussi vu fleurir les courants émergents de la période tels que le fauvisme, le cubisme ou le surréalisme. Au début du XXe siècle, les têtes d’affiche de l’école de Paris s’appellent alors Modigliani, Chagall, Soutine, Gondouin ou encore Utrillo. Ces derniers vont d’ailleurs tous passer par un lieu emblématique du mouvement dénommé « La Ruche », immense terrain de 5 000 m2 où les artistes se partagent ateliers et logements.

Le restaurant La Rotonde, porte d'entrée de Montparnasse

Les cités d’artistes 

La Ruche :

En 1900, Alfred Boucher, crée un lieu destiné à accueillir des artistes sans ressources. La Ruche représente un vrai refuge pour les artistes qui formeront l’École de Paris. C’est lors d’une promenade que le sculpteur Alfred Boucher, découvre et achète en 1900, un terrain de 5 000 m2. Il décide de faire un bâtiment, ou de jeunes artistes pourront travailler à peu de frais, dans une ambiance conviviale et fraternelle.

Cet ancien pavillon des vins, va être construit par l’équipe de Gustave Eiffel. Composé de petits ateliers, la ruche deviendra le point de rencontre des peintres et sculpteurs qui vont marquer l’histoire du siècle. Le pavillon va devenir un hôtel coopératif artistique et accueillir de jeunes artistes débarquant à Paris : tels que Fernand Leger Henri Matisse, Marc Chagall, ou Amedeo Modigliani. Les ateliers réalisés en bric et broc sont entourés de jardins.

Toile de Matisse peinte à la ruche dans le quartier de Montparnasse

Par la suite, une salle d’exposition (le Salon de la Ruche) et un théâtre de 300 places (la Ruche des Arts) viendront s’y ajouter. Alfred Boucher appelait ses artistes les abeilles, d’où le nom la ruche. Même si les ateliers ne sont pas confortables, car exigus, le lieu devient très vite une place de choix pour les artistes européens.

L’académie de la Grande Chaumière : 

Il est clair que l’existence de la Grande Chaumière à plus que compter dans le choix des artistes pour s’installer à Paris, au quartier Montparnasse. Dédier à la peinture et à la sculpture, l’académie recevait hommes et femmes, ce qui à l’époque été unique, car aux Beaux-arts, les femmes n’étaient pas admises. Des artistes venus des quatre coins du monde, ont donc pus étudier en toute liberté. Fondé en 1904, c’est en partie grâce à ses étudiants venus du monde entier qu’elle doit sons succès. En laissant place à la mixité, l’Académie à vu passer de nombreuses artistes femmes telles que Camille Claude, ou Jeanne Hebuterne.

La force des ateliers de l’académie était leur aspect très cosmopolite. On pouvait apprendre le dessin, le croquis et le nu d’après un modèle vivant, ce qui était rare à l’époque. La principale technique apprise était la technique du nu ou de l’esquisse. L’atelier était équipé d’un chauffage, pour le confort du modèle, mais qui en faisait également bénéficier les élèves. La Grande Chaumière permettra d’accueillir des centaines d’élèves et sera au cœur d’une intense activité artistique dans le Montparnasse des années Folles. On y pratiquait toutes les formes artistiques et de nombreux professeurs y enseignaient. 

Les marchés artistiques et le début de l’Art moderne

Le Montparnasse des années 20, c’est aussi le début de l’histoire du marché de l’art moderne. Des marchands comme Paul Guillaume vont très tôt déceler les grands talents. C’est grâce à un groupe d’artistes baptisé « la horde de Montparnasse », qui ont exposés en plein air des toiles à même le sol, que le grand marché de la création voit le jour. Ce marché eut un grand succès. Il faut dire qu’à cette époque, le boulevard du Montparnasse était un haut lieu du marché de l’art.

Les artistes venaient présenter leurs toiles et esquisses, pour marchander dans les nombreux cafés alentour. Le marché de la création est comparable à une grande galerie d’art exposant toutes les diversités artistiques : peintures, gravures, sculptures, céramiques, et autres domaines créatifs. Cette galerie à “ciel ouvert” permet aux artistes de présenter leurs œuvres, et à l’amateur d’art de rencontrer et de communiquer directement avec les artistes. 

Oeuvre d'Art Moderne de l'époque de Montparnasse

Montparnasse, une âme artistique, toujours présente

Aujourd’hui encore, l’esprit bohème réside dans le quartier Montparnasse. On pourrait croire que le temps s’y est arrêté, pour conserver la culture et la liberté de ce quartier. La Cité des Arts, a été conservée. Le quartier est tellement paisible et serein que quelques peintres et sculpteurs y résident encore, témoin du Montparnasse des artistes. Venir aujourd’hui dans le quartier Montparnasse, est le meilleur moyen de découvrir un patrimoine artistique riche et fabuleux, conservé avec le temps. Une chose semble sûre, l’Art n’est pas prêt de mourir dans ce quartier !

L’esprit de Montparnasse vibre encore aujourd’hui, grâce à quelques lieux choisis, comme ses galeries, ses cinémas, ou l’Académie de la Grande Chaumière qui demeure quasiment telle qu’à l’époque, où elle coexistait avec celles de Paul Ranson, de Matisse, ou de Van Dongen. À Montparnasse, on vient encore s’initier à la peinture ou à la sculpture de nu. Enfin, on peut toujours aller dans ces mêmes cafés, qui avec le temps, ce sont tout de même embourgeoisés, mais qui ont conservés cet esprit de l’époque. Aujourd’hui, à Montparnasse, il reste un parfum léger mais sensible de la vie artistique des années 20.