Frédéric Bazille : un peintre fulgurant

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Nous abordons ici la biographie d’un peintre dont le talent fut aussi précoce que courte fut sa vie. Frédéric Bazille est un peintre fulgurant qui a marqué l’histoire de l’art par son talent. Néanmoins, comme il est mort jeune, à moins de 30 ans (28 ans pour être précis), il aura laissé une oeuvre marqué par le Romantisme, l’Orientalisme. A bien regarder certaines de ses toiles, on peut même dire que Frédéric Bazille a été un des précurseurs de l’Orientalisme. Né à Montpellier en 1841, c’est d’ailleurs au musée Fabre que l’on retrouve la plus grande collection d’oeuvres du peintre languedocien.

Biographie de Frédéric Bazille

Enfant issue de la bourgeoisie protestante montpelliéraine, il débute des études de médecine pour faire plaisir à sa famille. Mais, très rapidement, il laisse s’épanouir sa vocation d’artiste en suivant des cours de dessin et de sculpture au musée Fabre de Montpellier.

Débuts académiques à Paris

En 1862, à 20 ans, il part s’installer à Paris où il suit les cours de peinture de Charles Gleyre. A cette époque, sa peinture est encore très académique, bien que s’expriment déjà des couleurs très vives qui constituent une des caractéristiques phares de l’oeuvre de Frédéric Bazille, comme on peut le voir dans cette Etude de nu de 1864, visible au musée Fabre de Montpellier.

Etude de Nu de Frédéric Bazille (musée Fabre de Montpellier)

Les prémices de l’impressionnisme

Rapidement, il rencontre les figures montantes de cette époque : Auguste Renoir, Claude Monet… Il rejoint ensuite un groupe qui préfigure les Impressionnistes, avec notamment Edouard Manet, Alfred Sisley, Camille Pissarro, Berthe Morisot… Mais aussi les écrivains Emile Zola et Paul Verlaine.

Il partage ainsi un atelier avec Auguste Renoir, puis avec Claude Monet. Alfred Sisley le rejoindra également dans cet atelier, situé rue Visconti à Paris, et qui sera d’ailleurs immortalisé dans une oeuvre de 1865 que l’on retrouve au musée Fabre de Montpellier, nommée L’Atelier de la rue de Furstenberg. Nous vous l’avons d’ailleurs reproduite ci-dessous.

L'Atelier de la rue de Furstenberg par Frédéric Bazille

Pour l’anecdote, cet atelier est situé juste au-dessus de l’ancien atelier d’Eugène Delacroix. En peignant cette toile, Frédéric Bazille souhaitait rendre hommage à Delacroix qui avait justement peint pareille vue de son atelier, avec le même poêle rougeoyant, une pièce austère et un désordre préparé à l’avance, pour remplir l’espace de l’atelier. Cette toile montre donc, d’une certaine manière, l’attachement de Bazille à l’école romantique française.

L’appartenance de Frédéric Bazille aux débuts du groupe impressionniste est également matérialisée par une toile : la Nature Morte au Héron. Cette toile a été peinte en même temps par trois peintres : Bazille, Sisley et Renoir. Voici ci-dessous la version peinte par Frédéric Bazille. Encore une fois, vous pouvez la retrouver dans les collections permanentes du musée Fabre de Montpellier.

Nature Morte au Héron de Frédéric Bazille

Allers-retours avec Montpellier pour des toiles bucoliques

La vie parisienne de Frédéric Bazille explique en bonne partie son oeuvre. Mais pour comprendre ses multiples influences, il faut aussi mentionner ses réguliers allers-retours entre Paris et Montpellier. Il retourne régulièrement dans le Languedoc, pour voir sa famille, et ses amis d’enfance. Il en profite alors pour immortaliser les sujets paysagers : vendanges, vues de plaines bucoliques, ciels bleus… La plupart de ses toiles sont immortalisées depuis le domaine du Méric, la propriété familiale des Bazille, située face au village de Castelnau-le-Lez, en périphérie de Montpellier.

Il lui arrive également de peindre depuis Bionne, où les Tissié (beaux-parents de Marc Bazille, frère du peintre) possèdent une propriété. Sur ces paysages, on distingue la plaine du Launac et la montagne de la Guardiole, avec des coteaux viticoles en contrebas.

Mort en héros pendant la guerre de 1870

En 1870, malgré les conseils de ses proches qui lui recommandaient de ne pas s’engager, Frédéric Bazille a décidé de s’engager comme militaire volontaire pendant la guerre franco-prussienne qui déchire alors la France, et fera naître la Troisième République. Arrivé comme sergent dans le 3ème régiment de zouaves, il deviendra ensuite sergent-major, avant de mourir de façon héroïque sous le feu ennemi.

Il meurt en voulant protéger des femmes et des enfants pendant la bataille de Beaune-la-Rolande, touché par balles au bras et au ventre. A seulement 28 ans, Frédéric Bazille s’est éteint laissant déjà des oeuvres abouties et reconnues dans l’histoire de l’Art. Ses contemporains ont été particulièrement marqués par ce décès brutal, à l’instar du sculpteur Auguste Baussan, qui a réalisé une sculpture monumentale afin d’orner sa sépulture, au cimetière protestant de Montpellier.

Style de Frédéric Bazille : entre réalisme, orientalisme et impressionnisme

Après une période très académique, Frédéric Bazille s’inscrit très rapidement dans un cercle d’artistes qui deviendra à partir des années 1870 les Impressionnistes. Mais, on n’utilise pas encore ce terme dans les années 1860. Ainsi, l’oeuvre de Frédéric Bazille se situe à la confluence entre le réalisme, le romantisme (et même l’orientalisme), et ce qui deviendra plus tard l’Impressionnisme.

Dans certaines toiles, comme la Petite Italienne chanteuse des rues de 1866 (reproduite ci-dessous), on découvre une thématique réaliste peinte de façon romantique, avec un sujet esthétisé, et mis en avant de façon méliorative, bien qu’il s’agisse d’une mendiante. Enfin, le ciel est déjà peint de façon surréaliste. On retrouvera les nuages peints de la sorte dans des oeuvres ultérieures d’Edouard Manet ou Claude Monet, voire dans certains tableaux de Paul Cézanne.

Petite Italienne chantant dans les rues de Frédéric Bazille

Voici ensuite une oeuvre au thème romantique (la Nature) peinte de façon réaliste. Il s’agit d’un paysage montpelliérain représentant les remparts de Castelnau-le-Lez. Nous aurions pu également évoquer La Toilette, une peinture de Bazille qui met en avant une scène biblique et orientaliste à la fois.

Paysage de Castelnau-le-Lez de Frédéric Bazille

Postérité de l’artiste : que retient-on de l’oeuvre de Frédéric Bazille ?

Après un hommage appuyé d’artistes contemporains (Auguste Baussan, Edmond Maître), l’oeuvre de Frédéric Bazille tombe dans un premier temps dans l’oubli. Puis, l’historien de l’art Roger Marx le redécouvre en 1900 et intègre deux de ses toiles dans son exposition, présentée pendant l‘exposition universelle de Paris. En 1926, Henri Focillon cherchera lui aussi à sortir le peintre montpelliérain de l’oubli. Mais, c’est à partir des années 1950, avec le regain d’intérêt pour la peinture impressionniste, que son oeuvre est vraiment redécouverte. Les musées américains commencent alors à s’arracher ses toiles, qui étaient jusque-là surtout collectionnées par la famille de l’artiste.

Le musée Fabre de Montpellier se rend alors compte qu’un peintre local était en train de devenir très collectionné, et il commence à enrichir son fonds d’oeuvres des toiles de Bazille. Au point d’être en mesure de présenter une importante exposition rétrospective en 1992.

A partir de là, les expositions se sont multipliées. D’abord à Atlanta en 1999, avec une exposition monumentale intitulée : « Monet & Bazille: A Collaboration ». Puis, en 2002, au musée Marmottan à Paris avec une exposition personnelle remarquée. Puis, le musée d’Orsay lui a consacré en 2017 une exposition particulièrement élogieuse intitulée : « Frédéric Bazille : la jeunesse de l’Impressionnisme ». La même année, cette exposition est dupliquée à la National Galery of Art de Washington.

Frédéric Bazille dans les musées

Naturellement, le peintre montpelliérain est particulièrement visible au musée Fabre, qui dispose d’un très important fonds Frédéric Bazille. Mais, en France, on retrouve également un excellent fonds Bazille au musée d’Orsay. Le musée de Grenoble possède également une oeuvre, tout comme le musée du Louvre. Ce dernier a d’ailleurs accepté un important don de la part du frère de l’artiste, Marc Bazille, principalement constitué de croquis et de dessins, qui permettent de mieux cerner l’oeuvre de Frédéric Bazille. Parmi eux, la Vue d’une grande maison , ou le Portrait d’homme barbu.

Hors de France, l’artiste lié à la naissance de l’impressionnisme est surtout présent dans les musées américains, comme le Metropolitan Museum of Art de New York, le Minneapolis Institute of Art, ou l’Art Institute de Chicago. Même l’Université d’Harvard dispose d’un tableau de Frédéric Bazille dans ses collections.

Acheter une oeuvre de Frédéric Bazille aux enchères : est-ce possible ?

A l’échelle de sa courte carrière (moins de 10 ans), Frédéric Bazille aurait peint moins de 60 oeuvres. Et encore, ce n’est qu’une estimation puisque l’artiste a signé moins de la moitié de ses oeuvres. Son neveu a d’ailleurs mis en vente aux enchères plusieurs d’oeuvres de l’artiste (via l’étude Cornette de Saint Cyr). C’est suffisamment rare pour être mentionné. Le total avait été estimé à 800.000 euros.

Au total, seulement 37 oeuvres de Frédéric Bazille ont été vendues aux enchères, et parmi celles-ci, certaines ont été acquises par des musées. Notamment le musée Fabre de Montpellier qui cherche en permanence à enrichir son catalogue d’oeuvres du peintre local. Le record absolu de Bazille aux enchères s’élève à 4,4 millions d’euros. Mais, le Pot aux Fleurs qui a été vendu à ce prix est une exception. La plupart du temps, les peintures de Frédéric Bazille sont adjugées à un prix autour de 400.000 euros.